vendredi 15 janvier 2016

- Le Gouffre de la Reine

En la grotte du Mas-d’Azil à gauche du torrent se trouve un gouffre ignoré des étrangers, mais bien connu des gens du pays sous le nom de « Gourgue Régine ».

Bien loin de redouter l’approche du gouffre, les fiancées du pays, suivant un usage ancien, se rendent au bord de la Gourgue et emplissent de son eau une grande cruche. Cette eau, est pour elles un talisman qui déjoue tous les mauvais sorts.
Aussi, en arrosent-elles copieusement leur chambre nuptiale.


Leur cruche emplie, elles se penchent sur le gouffre et longtemps restent muettes, toute leur attention tendue sondant l’eau sombre.

Elles attendent, les tendres et aimantes fiancées, L’apparition d’un pur visage de femme, aux longs cheveux blonds, aux prunelles d’azur. Heureuse, bien heureuse, celle qui voit la radieuse apparition. Son bonheur d’épouse et de mère est assuré. Voici, dans toute sa saveur naïve, la légende telle que la content les anciens du pays. Il y a de cela bien longtemps, vivait dans le pays un vieux roi qui avait une fille d’une grande beauté. On la nommait Aymigue, ce qui signifie dans la douce langue. du pays l’Aimée.


Sa mère étant morte, le roi, en hommage à son savoir qui n’avait d’égal que sa bonté et sa sagesse, avait fait d’elle une reine. Quand elle fut en âge de se marier, elle fut fiancée à un jeune prince qui habitait sous le beau ciel d’Espagne. Après de longs mois d’attente, l’arrivée du prince fut annoncée par de nombreux hérauts d’armes. La princesse Aymigue impatiente de voir celui qui serait bientôt son époux, décida d'aller avec une suite de chevaliers et de valets, à la rencontre du prince. 

Joyeuse de son proche bonheur, elle pénétra à la lueur des torches dans la grotte qu'elle devait traverser pour rencontrer sur l’autre versant son royal fiancé. Soudain, alors que le cortège se trouvait au, milieu de la grotte, un vent violent se lève et éteint les torches.
Une nuit profonde, totale lui succède. La reine, restée en arrière de sa suite, affolée par les ténèbres qui l’environnent veut rejoindre ses gens qui l’appèllent à grands cris. Mais le gouffre au bord duquel elle vient d’arriver sans le voir, happe le corps gracile. On ne devait jamais revoir la douce et tendre fiancée.


La Gourgue cruelle, jalousement, garde sa belle proie.

Mais, parfois, dit-on, le pur visage de la gente reine Aymigue vient flotter sur l’écume blanche. Quelques privilégiées seulement l’aperçoivent et s’en retournent rayonnantes. La douce Aymigue reste à travers les âges la protectrice des-jeunes fiancées du pays d’Azil.